Le secrétariat

*Après avoir passé son entretien avec le directeur, il y a maintenant quelques semaines, Trayvor devait désormais intégrer le manoir « Génésis ». Génésis… Sans doute ce lieu allait-il être effectivement une renaissance pour lui, suite à ces années pendant lesquelles il avait alterné hôpital psychiatrique et études.
C’est donc après avoir dernièrement passé un mois en internement que Trayvor, encore étonné de ce que l’une de ses deux mères adoptives, Lucie, lui avait proposé, qu’il arrivait à l’institut Génésis. Lucie… Une mutante, comme lui. Maintes fois celle-ci avait essayé, avec Christine, l’autre mère de Trayvor, de l’aider à utiliser son pouvoir, à ne pas se laisser submerger par celui-ci. Mais la folie revenait toujours, seconde personnalité cynique et destructrice.
C’est pourquoi, après 12 années d’efforts, les mères du jeune homme décidèrent d’accepter l’aide, depuis longtemps proposé, par l’institut. Lucie avait eu l’impression de l’envoyé au sein d'une « prison doré ». Mais elle avait gardé ce sentiment pour elle, préférant laisser Trayvor jugé par lui-même.
Et c’est ainsi, que, devant le manoir, une camionnette blanche arriva, lentement, et de laquelle Van Allighem descendit. Prenant un immense sac grisâtre, qu’il avait d’ailleurs du mal à porter, il se dirigea enfin vers l’immense entrée du manoir, et s’arrêta quelques instants, observant l’entrée avec inquiétude.*
< Hmm… D’extérieur, c’est magnifique et pourtant… J’ai peur de ce que je vais y trouver à l’intérieur. >
*Reprenant sa marche, il passa la porte d’entrée encore ouverte et scruta l’intérieur avec, de nouveau, cette même appréhension. Personne, et pas un bruit. Cela le rassurait un peu.
Avançant au travers des couloirs, tournant la tête à gauche, à droite, observant furtivement chaque pièce dont la porte était ouverte, il ne parvenait pas à trouver le secrétariat, où quelqu’un qui aurait pût lui indiquer où celui-ci se situait.
Au bout d’environ un quart d’heure, la panique l’envahissait, et là… Ce fût là, encore…*
< 'tin ! Mais t ‘es un boulet, ou quoi ? Laisse moi faire, je vais te le trouver le secrétariat >
*Trayvor continuait à sentir sa peur prendre le dessus, sachant ce qui allait sans doute arrivé, dans un endroit inconnu. Et cela vint.*
« Bien, alors, direction ce couloir, maintenant… Aaah, mais quel crétin, j’vous jure ! Oooh, mais que vois-je, là-bas… Utilisons-le, on ira plus vite, comme ça. »
*Et Van Allighem se dirigea vers un étudiant qu’il venait d’apercevoir non loin, fouillant dans un sac. Lui tendant la main, il lui demanda son chemin, sourire aux lèvres.*
« Excusez-moi, mais sauriez-vous où se trouve le secrétariat ? »
< Non, pas ça… Combien de temps vais-je rester ainsi, maintenant ?... >
< Mais laisse-moi faire : on ira plus vite ! >
*L’étudiant l’observa de bas en haut, et lui serra la main. Tout en souriant, il répondit à Van Allighem : *
« Juste derrière-toi, et sur la gauche… »
*En même temps, l’étudiant pointa du doigt un petit panneau « Secrétariat », et indiquant effectivement cette direction. Il aurait dût le voir.*
< Aaah ! Mais tu m’influences, ou quoi ? >
< Comme quoi je ne suis pas le seul à … >
< Ferme-la ! Comme je ne peux pas me défouler sur toi, je vais profiter de mon nouveau pouvoir… >
< Son pouvoir. >
< Ouais, c’est ça, si tu veux… >
*Tandis que Trayvor restait là, étrangement planté devant le petit panneau, à discourir intérieurement, l’étudiant qui lui avait indiqué le chemin partait sac sur le dos, étonné par le comportement du nouveau venu. Cependant, aussitôt c’était-il engouffré dans un des nombreux couloirs du manoir, qu’il vit, devant lui, chantonnant… Trayvor.*
« Mais… Comment ?... Ah, toi aussi, tu as ce pouvoir. Tant mieux, mais si tu penses qu'ici ont va applaudir à chaque fois, laisse tomber.»
*Mais, à peine avait-il prononcé ses quelques mots, que Van Allighem se retrouva derrière lui, et prononça ses quelques mots...*
« Non, je ne suis pas comme toi… Je suis… Au-dessus, petit être esclaves des humains. »
*...Avant de lui cogner violemment la tête contre un des murs. L'étudiant s'écroula.*
< Oh, non ! Arrête ! Je… Je… >
< Tu vas quoi ? Le dire à maman Lucie ? Réveil-toi : tu es seul, maintenant. Tu as besoin de moi. >
< … >
*Trayvor, arrivé enfin devant le secrétariat, toqua à la porte de celui-ci. Et rien. Aucune réponse.*
« Raaaah, mais putain, c’est pas vrai, ça !! »
*Trayvor donna un grand coup de pied à la porte, mais celle-ci trembla à peine. Posant son sac, il observa l’heure qu’indiquait sa montre.*
« 12 h 45… Et alors quoi ? Faut penser à bosser, un peu ! Foutu secrétaire de mer.. »
*Mais il fût aussitôt couper par une voix qu’il eut du mal à reconnaître. Le directeur.*
D : « Et bien, jeune homme. Je vois qu’il a encore reprit le dessus, n’est-ce pas ? »
*Cependant, le directeur n’attendit même pas la réponse de Trayvor, et ouvrit le secrétariat.*
T : « Aaah, merci, vous, au moins, vous me comprenez… Vous êtes si bon… Venez, que je vous serre dans mes bras. »
*Le directeur, presque sans s’en soucier, évita Trayvor et se dirigea vers l’un des deux bureaux du secrétariat.*
D : « Hmm… Voyons quelle chambre Micheline a déjà attribuée cette année… Bien, je vais donc vous attribuer la…155. »
*Trayvor prit la clef et manqua de justesse de toucher la main du directeur.*
T : « Aaah, si loin de vous… »
D : « Mais près du cœur, n’est-ce pas, Trayvor ? Je vous ai mis là, pour que cela soit à vous de faire l’effort d’aller vers les autres, et je sais que vous le voulez. Et pour d’autres plus évidentes raisons, c’est à dire … »
*Mais Van Allighem n’écoutait déjà plus le directeur, et se dirigeait donc vers ce qui allait être sa nouvelle chambre, sac sur la tête.*
< J’ai vraiment honte de ton comportement, parfois... >
< Moi, tout le temps du tien, espèce de lâche. >

*Tray passa rapidement devant le secrétariat, n’y prêtant guère attention, sortit du manoir, et s’assit sur les escaliers, tapotant de ses doigts fins ses jambes : il était impatient. Profitant de ses quelques instants, il repensa aux personnes qu’il avait vu la veille… Les jeunes hommes aux cheveux blancs, et la « tatoué », Yamina… L’un des deux jeunes hommes, celui qui aurait dû faire la visite, n’avait d’ailleurs guère apprécier que Tray lui empreinte son pouvoir.*
*Au bout d’à peine 5 minutes, une voiture sombre s’arrêta devant le bâtiment. Van Allighem se leva, reconnaissant la voiture de … Lucie.*
« Enfin… »
*Lucie sortie du véhicule, observant Trayvor, son fils adoptif, qui l’observait, lui aussi.*
« Tu as l’intention de rester là à me regarder sans réagir, ou tu veux ton rat, petit Tray’ ? »
*Lucie fit un clin d’œil à Trayvor, tout en lui souriant… « Petit Tray’ », un surnom affectueux qu’elle lui avait donné depuis longtemps, et que Tray aimait, mais plus pour le contexte et la personne qui le lui avait attribué.*
*Tray répondit avec un sourire à cette femme d’une quarantaine d’années, à la chevelure épaisse et sombre.*
« A vrai dire, je préfère voir mon rat… »
*Ils avaient toujours eût cette habitude : se lancer de tels piques étaient un jeu depuis longtemps établit entre la mère et le fils… Même si Tray était déjà parfois aller trop loin. Mais Lucie et Christine lui avait, jusqu’alors, toujours pardonné.*
« Bonjour quand même… », répondit Lucie, souriante.
*Puis elle ouvrit la porte arrière de la voiture marron foncée, et en sortit une petite cage grise, dans laquelle un gros rat albinos dormait tranquillement. Lucie tendit la cage à Trayvor.*
« Comme tu vois, il a toujours l’air aussi énergique. »
« En effet… »
*Tray secoua très légèrement la cage : le rat ouvrit un œil et, apercevant son « maître », s’étira, l’observa quelques instants, puis se rendormit*
« Il est même encore pire qu’avant… Tu l’as trop nourrit, non ? »
« Décidément, tu ne changes pas hein ?... »
*En disant cela à son fils, Lucie lui posa la main sur l’épaule*
« Mais tu vas mieux, n’est-ce pas ?... Il… Il est toujours là ? »
*Tray cessa d’observer son rat quelques instants, levant la tête vers sa mère… Mais il se contenta de sourire. Lucie décida donc d’éluder la question, allant vers des choses davantage terre-à-terre.*
« Bon. Sinon, tu viens à peine d’arriver, mais tout se passe bien, ici ?... »
*Lucie savait de quoi elle parlait… Il y a quelques années, déjà, elle… Mais elle ne voulait pas lui en parler. Pas encore. Tray devait évoluer. Beaucoup évolué.*
« Pour l’instant, oui, très bien. On verra par la suite. »
*Lucie observa sa montre, et s’excusa auprès de son fils*
« Désolé, petit Tray’, mais je dois vraiment y aller. N’hésite pas à nous appeler, hein ? »
*Après avoir salué son fils, Lucie repartie assez vite, laissant Tray remonter sereinement les escaliers. Clair-De-Lune, son rat, dormait toujours.*
« Pfff… Bah, oui… Elle t’as trop nourrit. Mais t’inquiétes, mon p’tit gars, on va t’refaire une santé ! Ca te dirait de la musique ? »
*Tray s’arrêta quelques instants, tenant la cage de sa main droite, la main gauche posée sur son menton*
« Ils doivent bien avoir un piano, ici, non ? »
*Et Tray rentra dans le manoir, à la recherche d’une quelconque salle de musique, toujours cage à la main. Pour le moment, et peut-être par chance, Tray n’avait toujours pas entendu « l’autre »… *